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Budget de la zone euro : les eurodéputés de la gauche française ciblent « l’échec personnel d’Emmanuel Macron »

TRIBUNE – Les eurodéputés français du groupe Socialiste & Démocrate Éric Andrieu, Raphaël Glucksmann, Sylvie Guillaume, Aurore Lalucq et Pierre Larrouturou jugent que le budget de la zone euro est un « ectoplasme » et accuse Emmanuel Macron d’être un « illusionniste ».

Alors que les ministres des Finances européens ont accouché d’un fragile compromis sur le principe d’un budget de la zone euro, les eurodéputés français du groupe S&D Éric Andrieu, Raphaël Glucksmann, Sylvie Guillaume, Aurore Lalucq et Pierre Larrouturou critiquent son ambition. Dans une tribune, ils reprochent ainsi à Emmanuel Macron d’avoir céder à l’Allemagne et aux Pays-Bas. « Plutôt que de continuer à convaincre, Emmanuel Macron préfère faire semblant d’avoir abouti, tel un illusionniste, et avec son ministre des finances accepter un projet qui n’a de budget de la zone euro que le nom », estiment-ils.
« Ce vendredi 21 juin, les chefs d’État et de Gouvernement vont finaliser un « instrument budgétaire pour la convergence et la compétitivité », que le président de la République française présente, très abusivement, comme un budget pour la zone euro.

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L’impératif d’un budget de la zone euro est une idée portée bien avant l’actuel président de la République. Pendant la législature précédente, le Parlement européen avait dessiné un véritable budget de la zone euro dans le rapport de Pervenche Berès et Reimer Böge. Nous avions su réunir une majorité derrière des propositions ambitieuses, jugées indispensables par le FMI, la BCE ou l’OCDE. Les membres de la délégation française du groupe S&D savent enregistrer les avancées, considérer le verre à moitié plein lorsque le résultat des négociations marque des améliorations ; mais là, force est de constater que le verre ne contient que quelques gouttes de ciguë pour l’Union économique et monétaire.

Le président de la République française est comptable de ce fiasco : il avait tout en main, il ruine ce projet. Cet instrument budgétaire est un ectoplasme, le résultat d’une série de renoncements et d’erreurs stratégiques masqués par des discours enflammés. Ce n’est pas parce qu’il faut savoir terminer une bataille qu’il faut le faire comme ça!

Plutôt que de continuer à convaincre, Emmanuel Macron préfère faire semblant d’avoir abouti, tel un illusionniste, et avec son ministre des finances accepter un projet qui n’a de budget de la zone euro que le nom. Ce dernier est en réalité calqué sur les propositions des opposants à une telle idée, menés par le gouvernement des Pays-Bas, auxquels l’Allemagne voulait faire plaisir pour se débarrasser du « problème français ». C’est contraire aux intérêts de la zone euro et donc de l’Union européenne, aux aspirations de tous les alliés de la France dans ce combat, comme l’Espagne, le Portugal ou la Grèce.

Sans l’essentiel, la fonction de stabilisation, et sans ressources propres, avec un budget au rabais, cet instrument ne permettra pas de faire face aux prochaines crises qui menacent, ni de financer les investissements au niveau européen. Pire, il valide la contractualisation des réformes structurelles souhaitée par l’Allemagne et provoque les pays non membres aujourd’hui de la zone euro, puisqu’il projette des investissements stratégiques qui n’ont pas de spécificités liées à l’euro.
Au Parlement européen, nous continuerons de plaider pour un véritable budget pour la zone euro, qui permette d’atténuer les chocs économiques qui concernent l’ensemble de la zone euro, ou ceux qui ne concernent qu’un ou plusieurs pays, mais ont des répercussions sur les autres.

Pour y parvenir, nous devons transformer le Mécanisme européen de stabilité – qui permet de faire face à des crises financières – en un véritable fonds de stabilité – qui permettrait de soutenir les pays confrontés à une récession profonde. Parce que rien ne peut se faire sans contrôle démocratique, ce nouveau fonds serait contrôlé par le Parlement européen, et géré par un ministre des Finances de l’eurozone qui assumerait les fonctions actuelles du commissaire à l’économie et du président de l’Eurogroupe.

Nous nous battrons également pour que le Pacte de stabilité et de croissance soit réformé afin de permettre des investissements publics compatibles avec les Objectifs de développement durable des Nations-Unies. Parce qu’il est aujourd’hui reconnu que l’Europe, dans son ensemble, de l’Allemagne à l’Italie, souffre de sous-investissement chronique, nous proposons en parallèle un plan d’investissement public notamment à travers un Green New deal européen afin de concrétiser l’Europe écologique et sociale. L’Union européenne doit être capable de dégager, chaque année, un budget de 100 milliards d’euros pour investir dans l’enseignement, les infrastructures, la transition écologique et in fine dans la création d’emploi.

Enfin, nous appelons à la création d’une banque européenne du climat et de la biodiversité qui fournirait à tous les pays de l’Union des prêts à taux zéro, exclusivement consacrés à la transition énergétique et à la protection du vivant. Cela garantirait ainsi à chaque pays une enveloppe correspondant à 2% de son PIB : la France disposerait par exemple de 45 milliards d’euros par an.

C’est avec ces objectifs que les eurodéputés français du groupe S&D s’engagent dans cette législature. »

Par Éric Andrieu, Raphaël Glucksmann, Sylvie Guillaume, Aurore Lalucq et Pierre Larrouturou.

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