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« La crise sanitaire que nous traversons est un révélateur de ce à quoi mène l’absence de coordination et de solidarité »

Un collectif d’eurodéputés français de l’Alliance progressiste des socialistes et démocrates au Parlement européen plaide, dans une tribune au « Monde », pour la mise en œuvre urgente d’une Europe de la santé, qui associe la recherche publique et un volet industriel, permettant à l’UE de produire de façon autonome nos médicaments.

 

Collectif. L’épidémie de coronavirus continue à se propager dans le monde avec plus de 175 000 personnes contaminées et des milliers de décès. Tous les pays sont désormais touchés au sein de l’Union européenne (UE), de nombreux Etats membres, dont la France, sont placés en quarantaine, les contrôles aux frontières font leur retour. Alors que nous vivons une crise sanitaire et économique sans précédent, à l’initial de cette crise, les chefs d’Etat et de gouvernement européens ne se sont pas coordonnés.
Seule une réunion extraordinaire s’est tenue par visioconférence, le mardi 10 mars, débouchant sur un « fonds d’investissement de réponse au coronavirus » de 25 milliards d’euros pour soutenir l’économie, le marché du travail, les secteurs vulnérables – artisans, secteurs culturels, restauration et hôtellerie – ainsi que les PME.

 

Les conséquences des contraintes budgétaires liées à la monnaie unique ont un impact non négligeable sur la santé des Européens. Nous devons tirer les leçons des erreurs du passé. La crise financière de 2008 nous a clairement démontré que la politique monétaire à elle seule ne peut pas résoudre tous les problèmes, et que les mesures nationales ne suffiront pas. Nous avons clairement besoin d’une relance budgétaire européenne commune et coordonnée, permettant aux pays les plus touchés de dégager des ressources pour contrer la récession économique.
Aide de la Chine à l’Italie

Des outils existent déjà, et nous devons nous en saisir en complétant, par exemple, les instruments de l’Union économique et monétaire pour apporter une réponse cohérente ; la Commission peut être amenée à réexaminer le mécanisme européen de stabilité financière dans le but d’alimenter un programme européen spécifique de lutte contre cette crise sanitaire. Enfin, il est tout à fait possible d’accroître les fonds propres de la Banque européenne d’investissement.

 

Outre l’économie, l’Union n’a pas été capable, dès le début, de réagir comme telle sur le plan sanitaire, confrontée aux réactions individuelles des Etats membres. Aucun n’a voulu mutualiser ses réserves de masques, de gel ou d’équipements hospitaliers. Ainsi, l’Italie, qui manquait cruellement de matériel, a reçu de l’aide… de la Chine et obtenu 1 000 respirateurs, pour assister les malades les plus gravement touchés.

Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, déclarait pourtant, le 2 mars dans le quotidien Les Echos, et à juste titre, que l’Europe devait jouer un rôle de leader dans la lutte pour endiguer le coronavirus. Même si nous saluons les premières mesures économiques annoncées par la Commission européenne, nous attendons de l’Union qu’elle joue son rôle de coordinateur avec des Etats membres, afin que ces derniers sortent de leurs logiques purement nationales.

 

Comme pour la crise migratoire, l’Europe de la défense, la politique agricole commune, ou plus largement le budget de l’UE, la notion de solidarité est toujours exclue des débats. Là où il faudrait davantage d’Europe, les Etats se replient sur eux-mêmes. Si le Coronavirus est plus efficace que la Commission européenne et que les Etats membres, c’est que pour le virus, les frontières n’existent pas, alors que dans la gestion politique des crises actuelles, elles n’ont jamais été aussi présentes.

Fragilité

La crise sanitaire que nous traversons est un révélateur de ce à quoi mène l’absence de coordination et de solidarité. L’Europe doit de façon urgente travailler à l’élaboration industrielle de relocalisation de notre production pour une véritable Europe de la santé, qui s’appuie sur une véritable stratégie afin d’anticiper les futures crises sanitaires.

 

Une Europe de la santé qui comprend à la fois un volet industriel et recherche publique ; permettant à l’UE de produire de façon autonome nos médicaments. Aujourd’hui, 80 % des principes actifs des médicaments vendus en Europe et 40 % des médicaments finis proviennent de Chine et d’Inde, signe de la fragilité de notre industrie pharmaceutique.
Il aura donc fallu une crise sanitaire mondiale pour que l’UE reconnaisse (enfin) l’absence d’une souveraineté en matière de médicaments, menaçant ainsi gravement la santé de ses citoyens.
La crise que nous traversons doit être l’occasion d’une profonde remise en question de notre manière de traiter les questions sanitaires transnationales. Nous appelons les dirigeants européens à œuvrer en faveur d’une action urgente dans le but de coordonner les mesures sanitaires, les efforts de recherche publique et notre réponse économique. Nous devons restaurer la « souveraineté sanitaire » européenne, et vite !

 

Les signataires : Eric Andrieu, PS, eurodéputé socialiste, est vice-président du groupe Alliance progressiste des socialistes et démocrates au Parlement européen ; Sylvie Guillaume, PS, eurodéputée (Alliance progressiste des socialistes et démocrates), est présidente de la délégation de la gauche sociale et écologique ; Pierre Larrouturou, Nouvelle Donne, eurodéputé (Alliance progressiste des socialistes et démocrates), est membre de la commission du budget au Parlement européen ; Nora Mebarek, PS, eurodéputée (Alliance progressiste des socialistes et démocrates) est membre de la commission développement régional au Parlement européen.

 

Source : Le Monde

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