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Détachement des travailleurs : mauvaise foi, mensonges et ignorance à l’UMP

Tribune  de la Délégation Socialiste Française publiée le 5/12/2013 sur Le Huffington Post

L’arlésienne du Parlement européen a publié, avec un collectif de députés et de sénateurs de l’UMP, une tribune dans les Échos du 26 novembre dernier intitulée « Détachement des travailleurs: la faute de Bruxelles ».

Encore une occasion pour la droite d’ajouter des contre-vérités sur ce sujet central qui mobilise les eurodéputé-e-s socialistes depuis la dernière campagne des Européennes.

Première remarque, la ficelle est bien grosse: ces élus mesurent l’impopularité de M. Barroso et de son collège de Commissaires, ils veulent donc s’en distinguer… sans s’interroger une minute sur leur part de responsabilité ! Qui a porté au pouvoir M. Barroso? Eux! Qui a voté son investiture? Encore eux, quand nous votions contre, notamment parce que M. Barroso refusait de réviser la directive détachement des travailleurs ! De quel parti est-il issu? Du leur, le Parti populaire européen, comme la très grande majorité des Commissaires européens, du Parlement européen et de celle des chefs d’État et de Gouvernement des pays de l’Union. En résumé : leur tribune dénonce leur propre bilan, les ravages causés par leur idéologie, celle du laisser-faire, et de la concurrence à tout va. Que n’ont-ils voté contre une politique qu’ils dénoncent? De quelle vigilance se félicitent-ils?

Ensuite, les mêmes irresponsables s’en prennent en vrac aux charges dites excessives en France, alors que l’action de François Hollande vise justement à restaurer la compétitivité française massacrée par 10 années de droite au pouvoir : le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi est le meilleur exemple de l’action volontariste et courageuse menée par la gauche au pouvoir.

Enfin, et c’est le plus grave, tant le contre sens est énorme, ils écrivent que « le gouvernement français a toutes les peines du monde à faire adopter la directive d’exécution ». C’est mal connaître le processus décisionnel européen et l’état des dossiers. C’est oublier de dire que seuls la détermination des socialistes européens et le soutien du mouvement syndical ont finalement contraint M. Barroso à proposer à minima une directive d’application.

La France, d’une fermeté exemplaire dans ce dossier fondamental, a empêché la signature d’un compromis trop timide, voire dangereux, lors d’une réunion des ministres européens du travail, le 15 octobre à Luxembourg. Elle a réussi à associer d’autres pays autour d’un nouveau projet de texte. Il faut non seulement remédier aux détournements par des employeurs indélicats des dispositions de la directive de 1996, mais surtout gagner sur deux points importants. Le premier, l’article 9, traite des mesures de contrôle et des pièces justificatives que les États membres sont habilités à exiger d’une entreprise étrangère détachant des travailleurs sur leur territoire. La France -aux côtés de l’Allemagne, du Luxembourg, de l’Italie ou de l’Espagne- défend le principe d’une « liste ouverte », autorisant les Etats à exiger un large éventail de mesures de contrôle. Ce que refuse un autre groupe, emmené par la Grande-Bretagne et certains pays de l’Est, qui exige une liste « fermée », plus limitative, prétextant l’insécurité et les lourdeurs juridiques pour les entreprises.

Parce qu’une liste ouverte est le seul moyen de contrôler les faux détachements ou les entreprises ‘boites à lettres’, nous avons défini ce point comme une « ligne rouge ». L’autre point qu’il faut arracher, c’est l’article 12, pour instaurer la responsabilité des donneurs d’ordre. La France -avec une position très ambitieuse du Parlement européen et le soutien d’autres États- souhaite voir imposé le principe d’une « responsabilité solidaire », obligeant par exemple une entreprise à prendre en charge les salaires des travailleurs détachés qui n’auraient pas été versés par un sous-traitant défaillant. Mais là encore, cette obligation – même circonscrite dans l’actuelle proposition de directive au seul secteur du bâtiment – se heurte à l’opposition d’autres États, qui entendent que cette responsabilité soit seulement « optionnelle ». L’absence d’obligation rendrait difficile toute sanction dans le cas des prestataires qui, par des jeux de facturation complexe, sont organisés en cascade à travers plusieurs États européens.

C’est pour obtenir des avancées réelles sur ces deux articles que la France et ses alliés ont renvoyé les négociations entre ministres au 9 décembre prochain et que le Président de la République a souhaité que ce dossier soit évoqué lors du sommet sur l’emploi des jeunes à l’Élysée le 12 novembre.

Laissons les citoyens trancher, en mai 2014, entre ceux, qui comme nous, plaçons très haut le principe de responsabilité et de travail en profondeur des dossiers, et ceux qui, systématiquement, font la course au plus europhobe, en oubliant que le bilan qu’ils critiquent avec tant de hargne est le leur !

Eric Andrieu, Pervenche Berès, Françoise Castex, Jean-Louis Cottigny, Harlem Désir, Sylvie Guillaume, Liêm Hoang-Ngoc, Gilles Pargneaux, Isabelle Thomas, Patrice Tirolien, Catherine Trautmann, Bernadette Vergnaud, Henri Weber.

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