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L’agriculture bio progresse vaille que vaille

En plein essor en France où le nombre d’agriculteurs bio a bondi de 9 % cette année, le bio n’aura plus droit aux aides au maintien dès 2018. Un choix qui risque de fragiliser la filière française, comme cela a été le cas au Royaume-Uni et aux Pays-Bas.

Le salon Tech&Bio a posé ses valises les 20 et 21 septembre dans la Drôme, le département français leader en agriculture biologique. Pour la sixième fois depuis 2007, ce grand rendez-vous européen de l’agriculture biologique rassemble les professionnels de ce secteur en pleine expansion.

Et présente des innovations de plus en plus nombreuses : le robot Naïo, qui désherbe en autonomie les cultures maraîchères, le tracteur électrique Toutilo qui permet à l’agriculteur de faire ses semis, récolter ou encore désherber en position allongée, ou bien le poulailler mobile « HühnerMobil » qui permet de déplacer les poules en fonction des besoins, au sein d’une exploitation. Au fil des années, les solutions techniques pour favoriser le passage des agriculteurs au bio se sont multipliées.

Si l’agriculture bio ne représente aujourd’hui qu’une fraction de l’agriculture française – 7,3 % des exploitations et 10,8% de l’emploi agricole – elle n’est plus un secteur de niche. Et attire chaque année de plus en plus d’agriculteurs.

« Au salon Tech&Bio, il y a autant d’agriculteurs bio que d’agriculteurs conventionnels qui viennent ici rechercher des solutions, se renseigner en vue d’une éventuelle conversion, partager leurs expériences » explique Olivier Brès, vigneron  en côtes du Rhône, adepte de la biodynamie.

Au premier semestre 2017, le nombre d’agriculteurs à se lancer dans la bio a de nouveau augmenté de 9,2%, selon les derniers chiffres publiés par l’Agence Bio. Cette hausse est aiguillée  par une demande toujours plus forte de la part des consommateurs français. « Aujourd’hui, il y a une véritable demande en produits biologiques, ce qui n’a pas toujours été le cas » explique Jean-Michel Borja, viticulteur bio dans la Drôme.

D’après les derniers chiffres de l’Agence bio, les Français sont toujours plus nombreux à acheter des produits bio, mais surtout de plus en plus mobilisés sur la nécessité d’une agriculture respectueuse de l’environnement. Ainsi, 85% des Français estime que l’agriculture biologique est une solution face aux problèmes environnementaux et doit être développée.

En 2016, le marché de l’agriculture bio a pesé 7 milliards d’euros, soit une croissance de 20% par rapport à 2015. Un dynamisme qui n’est pas cantonné à l’Hexagone. En cinq ans, la surface agricole cultivée en bio dans l’Europe des 28 a aussi fait un bond de 21%, à 11,1 millions d’hectares en 2015 contre 9 millions d’hectares en 2010, selon Eurostat.

Une filière encore fragile

Malgré ses atout, la filière bio est toutefois encore fragile, selon les professionnels du secteur.  « La demande en produits issus de l’agriculture biologique ne s’essouffle pas. Ce n’est pas sur la consommation que les agriculteurs ont des craintes, mais sur la partie technique de l’agriculture biologique, et c’est là-dessus qu’il faut les aider » explique Rémy Fabre, vice-président de la Chambre d’agriculture de l’Ardèche.

La question de la suppression des produits phytosanitaires lors d’une conversion à l’agriculture biologique demande notamment un véritable changement d’approche. Que beaucoup redoutent.

« Réduire de 10 à 20 %  l’utilisation de produits phytosanitaires en agriculture, c’est accessible au plus grand nombre des agriculteurs. Mais pour aller au-delà, il faut qu’ils soient accompagnés techniquement et formés », explique Philippe Mauguin PDG de  l’Institut national de la recherche agronomique (INRA).

La question des aides

Aujourd’hui accompagnée dans le cadre de la Politique agricole commune (PAC), la conversion à l’agriculture biologique en France devra pourtant bientôt se passer d’une partie des aides financières dont elle bénéficie : les aides au maintien.

Ces aides, versées aux agriculteurs bio pour compenser en partie les coûts engendrés par la bio, seront supprimées à partir de 2018. Le gouvernement préfère mettre l’accent sur les  aides à la conversion, qui accordent aux agriculteurs d’une enveloppe pour passer à l’agriculture biologique.

« C’est au marché de soutenir le maintien de l’agriculture biologique, car la demande est là et il faut que nous soyons collectivement en capacité d’y répondre », a déclaré le ministre de l’Agriculture Stéphane Travert au salon Tech et Bio à Bourg-lès-Valence, rapport l’AFP.

« Si l’on doit faire un choix, il faut miser sur la conversion, c’est là que les choses se jouent. » confirme Eric Andrieu, porte-parole des eurodéputés socialistes sur l’agriculture. « Mais il est vrai que ce choix intervient peut-être un peu tôt dans  la stabilisation du secteur ».

A l’avenir, c’est la réforme de la PAC qui devra mettre l’accent sur l’agriculture biologique. « L’agriculture biologique devrait être le principal bénéficiaire de la future PAC. Mais cette révolution dans la politique agricole, nous en sommes encore loin » regrette l’élu.

 

Le bio français rattrape son retard en Europe

En forte progression, l’agriculture biologique représente aujourd’hui  4,9% de la surface agricole utile française. Mais le pays demeure loin des pays leader comme  l’Autriche ou la Suède. Un article de notre partenaire le Journal de l’Environnement.

Au sein de l’Union européenne, les expériences d’allègement des aides au bio n’ont pourtant pas fructueuses.

« Au sein de l’UE, seuls deux pays ont vu dans leur agriculture bio chuter,  le Royaume-Uni et les Pays-Bas » explique  Florent Guhl, directeur de l’Agence Bio.

En 2015, la surface agricole cultivée en agriculture biologique outre-Manche avait  reculé de 29 % par rapport à 2010, soit 495 929 hectares perdus en 12  mois. Aux Pays-Bas, ce sont 44 402 hectares bio,  qui ont disparu, soit un recul de 4 %.

« Et comme par hasard, ce sont les deux pays européens qui ont supprimé les aides au secteur sous prétexte que celui-ci était suffisamment mature » a mis en garde Florent Guhl. « Pour une fois que le dynamisme d’un secteur est tiré par la consommation, il ne faut pas couper dans les aides ! ».

 

Source : Euractiv

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