« Le secteur du vin est en danger ! Confinement, fermetures des restaurants, des bars, des magasins, accès aux supermarchés limités: un milliard de litres de vin européen pourraient être perdus et avec eux le revenu de milliers de personnes. Il est impératif que ce vin, plutôt que d’être perdu, soit distillé. L’Union européenne doit en outre soutenir financièrement, avec le pouvoir national, ce processus de transformation. L’objectif est en tout cas clair: éviter le gaspillage et de très nombreuses faillites », averti Eric Andrieu, eurodéputé PS en charge des questions agricoles. »
« J’interpellerai ce matin en ce sens le Commissaire européen afin de dégager des solutions » rajoute encore Eric Andrieu qui avait déjà, dans le contexte de cette crise sanitaire, tiré la sonnette d’alarme il y a quelques jours sur la question des excédents alimentaires cette fois.
« Permettre à un maximum de gens de garder leur emploi, éviter le gaspillage, et de manière plus globale garantir la stabilité du secteur agricole sont des tâches qui doivent être endossées par l’Europe ! »
USA – Asie – Europe: comment en est-on arrivé là?
Le contexte était déjà compliqué pour le secteur viticole. Depuis octobre, en représailles des subventions versées à Airbus, les États-Unis avaient largement entravé l’accès du vin européen sur son territoire en y apposant des taxes douanières imposées par Donald Trump. Quelques semaines plus tard, c’est la Chine, Singapour puis le reste de l’Asie qui ferma ses frontières, renvoyant même les containers de vins en transit. Et puis ce fut le tour de l’Europe, le confinement, les fermetures de restaurants de bars, de magasins.
Seulement voilà, tout ce vin qui n’est ni exporté ni consommé chez nous est stocké dans des cuves dont une majorité sont presque ou totalement remplies, compte tenu des circonstances. Et ce sont ces mêmes cuves qui doivent accueillir dans quelques mois le résultat de la vendange 2020; il faut donc de la place sans quoi ce vin sera perdu, avec des conséquences économiques dramatiques pour le secteur.
Une solution concrète avec le soutien de l’Europe
Il faut distiller une partie de la production, celle qu’on estime excédentaire. Pour l’Europe, il s’agit de près d’un milliard de litres.
En France concerné pour un tiers de ce volume, le coût de distillation devrait être de 80 centimes du litre, soit 80€ de l’hectolitre, calcul basé sur le fait qu’il soit principalement question de vin d appellation protégée (AOP) et d indication géographique protégée (IGP).
En pratique, et aux vu des règlements, il appartient à l’autorité nationale de prendre en charge le cout de cette distillation, mais je demande à l’Europe, dans ces circonstances exceptionnelles, qu’elle s’engage à hauteur de 35 de ces 80 € afin de soutenir l’État membre mais aussi et surtout les viticulteurs. La possibilité devrait être aussi laissée aux producteurs qui le peuvent encore ou le souhaitent de constituer des stocks privés durant cette période particulière, et ce avec le soutien européen, comme je l’avais également suggéré pour les produits alimentaires issus de l’agriculture. »
La distillation est une alternative, certes moins rémunératrice que la vente de vin, mais qui permettra aux viticulteurs de s’en sortir et de pouvoir également récolter en 2020 et donc de relancer les exploitations. Qui plus est, l’alcool ainsi produit pourra servir dans de nombreux secteurs, entre autre pour la fabrication de gel hydroalcoolique.
La distillation de crise est une mesure conjoncturelle sur le court terme, qui devrait s’étaler entre juin et aout, non d’une mesure structurelle. La Commission européenne doit épauler le secteur agricole et anticiper au mieux les évènements à venir. Une fois encore, je le répète, la Commission européenne ne peut rester confinée et spectatrice de ce qui se profile à l’horizon. « Elle doit prendre toutes les mesures possibles pour limiter les conséquences économiques et sociales de la crise sanitaire…et elle doit le faire maintenant ! » conclut sans détour l’élu socialiste Eric Andrieu.
Question avec demande de réponse écrite
à la Commission
Article 138 du règlement intérieur
Eric Andrieu
Objet: Le secteur du vin victime du Coronavirus : l’Europe doit agir
Les effets du Coronavirus sans précédent que nous connaissons se font tous les jours davantage ressentir sur l’ensemble des activités économiques, l’agriculture ne faisant pas exception. La plupart des secteurs sont confrontés à un problème de ralentissement de la demande consécutives aux mesures prises pour lutter contre le virus. Les représentants du secteur viticole dont un certain de nombre de marchés se sont fermés se retrouvent avec d’importants stocks de vins invendus alors que la prochaine campagne se rapproche. Les conséquences de cette crise se conjuguent avec une situation rendue déjà difficile depuis plusieurs mois par les sanctions américaines et le ralentissement de la demande chinoise.
Il apparaît aujourd’hui vu la conjoncture, plus que jamais indispensable de mettre en place des mesures temporaires et exceptionnelles de marché, si l’on veut éviter une chute brutale des prix et bien des catastrophes dont la disparition de nombreux producteurs sur bien des territoires. Ces mesures qui appellent un effort de solidarité pour l’ensemble de la filière européenne ne peuvent efficaces qui si elles sont prises au plan de l’Union.
Est-ce que la Commission qui est la garante du bon fonctionnement du marché intérieur, pense pouvoir autoriser en urgence la distillation de crise et/ou le stockage demandé par plusieurs États membres pour venir en aide aux producteurs et participer au co-financement de ces mesures pour éviter une chute drastique des prix ? À quelle échéance, le cas échéant la Commission envisage- t-elle d’agir ? Il y a urgence !