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Neutralité du net : Internet, un espace public !

Tribune de la DSF publiée dans le Huffington Post le 27/10/2015

Mardi 27 octobre, le Parlement européen s’est prononcé sur un ensemble de textes concernant notamment le roaming et la neutralité du net, après de longs mois de négociations avec les Etats membres.

Le roaming -ou frais d’itinérance- tout le monde le sait, il s’agit des frais payés aux opérateurs téléphoniques par les utilisateurs lorsqu’ils passent une frontière au sein de l’Union européenne. Depuis des années, grâce à l’action des socialistes, ces frais diminuent: à partir du 15 juin 2017, ces surcoûts seront interdits. C’est une avancée considérable pour le pouvoir d’achat des Européens et un soutien à la mobilité européenne.

À l’inverse, la neutralité du net reste un concept flou pour beaucoup. De quoi s’agit-il? C’est un principe que nous défendons depuis longtemps et qui garantit l’égalité de traitement de tous les flux de données sur Internet. Ce principe exclut ainsi toute discrimination, restriction, ingérence à l’égard de la source, de la destination ou du contenu de l’information transmise sur le réseau.

Internet est, pour les socialistes et radicaux, un espace public où chacun doit pouvoir accéder à un service ou une application de son choix, sans restriction ou limitation décidée de façon arbitraire par un opérateur.

Jusqu’à présent, il n’y avait pas de règles européennes contraignantes: seuls deux Etats -Pays-Bas et Slovénie- disposaient d’une législation. Avec ce règlement, le principe de la neutralité du net sera consacré dans 28 systèmes juridiques nationaux: c’est une avancée majeure pour tous les Européens.

Alors que la droite européenne, par la voix de sa rapporteure, était prête à accepter une neutralité au rabais en échange d’avancées sur le roaming, les Socialistes et Démocrates ont réussi, avec l’appui de la société civile, dont beaucoup d’organisations ont salué le résultat, à créer un rapport de force favorable aux citoyens européens et à l’innovation. Nous avons réussi à introduire plusieurs garde-fous afin que les « services spécialisés » (la TV sur les offres « triple play », par exemple) ne soient pas confondus avec les « services d’accès à Internet », et ne « cannibalisent » pas ces derniers. Nous avons aussi réussi à inscrire un principe exigeant d’égalité de traitement du trafic conforme à la position forte que le Parlement avait défendue en première lecture. Afin de surveiller et de contrôler l’application de ce principe, les régulateurs nationaux seront obligés d’assurer la pleine mise en œuvre de cette proposition et disposeront de pouvoirs supplémentaires pour y parvenir.

Certains groupes politiques peut-être pas toujours très actifs au cours des négociations, disent aujourd’hui que le texte est une catastrophe, tout en prétendant qu’avec une poignée d’amendements ils pourraient en faire une merveille. C’est une pure opération de com’ sans cohérence aucune. Nous avons, pour notre part, préféré déterminer le seuil à partir duquel le résultat de cette négociation était acceptable ou non.

Parce que l’adoption d’un seul amendement ferait tomber l’accord et nous emmènerait dans le meilleur des cas dans une nouvelle négociation périlleuse, au pire dans une impasse -dans l’hypothèse où le Conseil refuserait de prolonger la procédure-, nous faisons un choix de responsabilité: engranger maintenant un résultat solide même s’il n’est pas parfait, plutôt que de faire miroiter un résultat qui, en l’état actuel des rapports de force, n’est pas atteignable.

Place, maintenant, à la mise en œuvre ! Dans cette étape, tout aussi cruciale, nous resterons attentifs aux idées et aux remarques de la société civile, vigilants contre les lobbies, et sincères dans la recherche de solutions concrètes qui fassent progresser les droits des citoyens européens.

Tribune cosignée par : Eric Andrieu, Guillaume Balas, Pervenche Berès, Jean-Paul Denanot, Sylvie Guillaume, Edouard Martin, Emmanuel Maurel, Louis-Joseph Manscour, Gilles Pargneaux, Vincent Peillon, Christine Revault d’Allonnes-Bonnefoy, Isabelle Thomas et Virginie Rozière.

Pour consulter la tribune sur le site du Huffington Post, cliquez ici.

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Pour aller plus loin, la liste détaillée des acquis dans les négociations:

• Tous les éléments de la définition de la neutralité acquis en première lecture ont été intégrés dans la partie opérationnelle du texte (article 3). Ainsi, le Groupe S&D a lutté pour que le principe de base posé dans la régulation soit le plus radical et le plus clair possible: tout le trafic devra être traité de façon égale et sans restriction, discrimination ni interférence;

• La question de la place réservée aux « services spécialisés », ces services qui passent par la même infrastructure que l’accès à Internet mais ne répondent pas aux mêmes exigences de neutralité (ex : sur les box, la TV par IP) était délicate. Pour nous, l’accès à l’Internet « de base » et sa neutralité doivent toujours rester la priorité; cependant, on ne peut pas complètement fermer la porte à ces services spécialisés; il faut donc les délimiter afin qu’ils ne soient pas, pour les opérateurs, une porte de contournement de la neutralité du net. Nous avons ainsi bataillé pour l’inscription de quatre garde-fous à l’article 3;

• Ces services dits spécialisés doivent être optimisés pour un service, un contenu ou une application spécifique;

• Cette optimisation doit être nécessaire, c’est-à-dire que ce service ne pourrait pas fonctionner sur l’Internet « best effort »: à contrario s’il peut fonctionner correctement sur l’Internet, il n’est pas un service spécialisé et par conséquent ne peut se soustraire au régime de neutralité;

• La capacité du réseau doit être suffisante pour que ces services soient proposés en plus de l’accès Internet;

• Ces services ne doivent pas être proposés en remplacement de l’accès Internet, et ne doivent pas exister au détriment de la qualité générale de l’accès Internet;

• Nous aurions voulu pouvoir interdire clairement la pratique dite du « zero-rating »; quand un opérateur fait un accord préférentiel avec une application ou un service, par exemple Spotify, dont l’usage ne sera alors pas décompté dans la consommation du client et ne lui fera donc pas dépasser son plafond. Cette approche peut certes être vue comme avantageuse pour le client, mais elle est aussi très restrictive dans sa liberté de choix et limite l’émergence de concurrents face aux grands acteurs déjà établis. Malheureusement, ce point a été mis « hors-champ » de la négociation. Néanmoins, ce texte donnera des armes pour contester d’un point de vue technique certaines pratiques qui ressortent du « zero-rating » (en particulier le fait que pour rendre la discrimination tarifaire opérante, il faut se livrer à une discrimination de trafic qui elle, percute les règles adoptées). Notre Groupe sera très prochainement à l’initiative d’une question orale sur ce point pour forcer la Commission à clarifier son interprétation.

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